La pensée
écologique est aujourd’hui traversée par un paradoxe fondamental : d’un
côté, se manifeste une exigence « anti-anthropocentrique », qui consiste
à refuser que l’humanité ait une place privilégiée au sein de la nature, tandis
que d’un autre côté se manifeste une exigence opposée, qu’on pourrait dire « néo-anthropocentrique »,
qui consiste à accentuer la responsabilité morale de l’humanité envers la
nature (la responsabilité impliquant non seulement la culpabilité de l’humanité
mais aussi ses devoirs correspondants envers la nature). Le paradoxe est donc que
le privilège de l’humanité au sein de la nature est simultanément contesté et
accentué : contesté par l’exigence anti-anthropocentrique qui pose que
l’humanité est une espèce parmi les autres, sans privilège particulier ;
accentué par l’exigence néo-anthropocentrique qui pose que l’humanité est
l’unique espèce au sein de la nature à pouvoir empêcher la catastrophe qui se
prépare, aussi et surtout parce qu’elle en est à l’origine. Bref, l’humanité se
trouve à la fois décentrée et recentrée, ses privilèges étant simultanément
abolis et renforcés. Ce cours
analysera ce paradoxe.