La
vie et le vivant constituent un problème épistémologique majeur pour la
tradition philosophique occidentale. En effet, le corps vivant présente des
caractéristiques inédites. A la fois corps matériel, connaissable par le biais
des lois physico-chimiques, donc traitable comme n’importe quel autre morceau
de matière ; et corps vivant et vécu, présentant des caractères inédits
qui semblent le distinguer des autres systèmes physiques ou artefacts. Ce
problème a appelé, dans la tradition philosophique, deux solutions
épistémologiques majeures : le réductionnisme, selon lequel le vivant est
réductible à d’autres étants de la réalité, notamment aux systèmes physiques ou
aux machines, et ne présente pas de singularité propre ; le vitalisme, qui
postule un principe étranger au reste de la matière pour rendre compte de la
particularité et de la singularité que semblent manifester les êtres vivants et
leurs corps. Nous tenterons, dans ce cours, d’élucider ce problème
philosophique majeur et d’en retracer l’histoire, en nous penchant sur la
manière dont différents penseurs (Aristote, Descartes, Kant, Canguilhem, Jonas
notamment) et différentes ontologies (le dualisme cartésien, le matérialisme
réductionniste, le vitalisme et la phénoménologie) s’y sont pris pour le
traiter. La perspective théorique sur laquelle débouchera le cours est
influencée par la phénoménologie de la vie et la biologie philosophique de Hans
Jonas, ayant comme but de proposer un monisme non réducteur qui saisit la
singularité et la spécificité du vivant sans postuler un principe étranger au
reste de la matière.