Pour pouvoir veiller sur une quelconque évolution ou velléité d’évolution juridique, il ne suffit pas de savoir utiliser les outils de veille. Il semble important de bien connaitre l’origine et le cycle de vie d’une loi. La maitrise des différents stades de croissance d’une loi va permettre de savoir où trouver les documents pertinents. C’est pourquoi nous étudierons d’abord le cheminement de la fabrique normative pour ensuite s’intéresser aux médias et outils facilitant l’accès aux documents visant à suivre l’actualité juridique.

La mise à l’agenda (agenda setting)

Un changement législatif survient lorsqu’un problème est mis à l’agenda. Ce sont « l’ensemble des problèmes faisant l’objet d’un traitement, sous quelque forme que ce soit, de la part des autorités publiques et donc susceptibles de faire l’objet d’une ou plusieurs décisions ».[1]

Cette mise à l’agenda provient de l’action des personnes ou phénomènes suivants :

·         Les médias : stratégies professionnelles et éditoriales, avec notamment la hiérarchisation de l’information.

·         Les mobilisations collectives (associations, Lobbys, partis, Think Tanks…). Ces derniers vont utiliser différents moyens : grèves, manifestations, actions symboliques, violences… pour attirer l’attention des médias, des politiques et de l’opinion. Ces mobilisations collectives sont incarnées par des porte-paroles.

·         Les élus ou l’administration : ex : le RSA a été popularisé par Martin Hirsch, le revenu universel par Benoit Hamon, les heures supplémentaires par Nicolas Sarkozy...

·         Les universitaires, les experts : publication d’un livre, d’un rapport, de statistiques, d’études, de l’évaluation d’une politique publique. Ex : la Cour des comptes. CESE

·         Evènements extérieurs (catastrophe naturelle, attentat, crise des subprimes…)

 

La procédure parlementaire[2]

L’initiative de la loi

L’initiative de la loi appartient au Gouvernement et au Parlement. Un ministre formule un projet de loi et un parlementaire élabore une proposition de loi.

Les projets de loi sont précédés de l’exposé de leurs motifs et font l’objet d’une étude d’impact[3]. Ces deux éléments sont facultatifs pour une proposition de loi.

En vertu de l'article 39 de la Constitution, le Conseil d'État est obligatoirement saisi de tous les projets de loi, avant leur adoption par le Conseil des ministres et leur dépôt devant le Parlement. En vertu de l'article 38 de la Constitution, il doit être saisi des projets d'ordonnance avant leur adoption par le Conseil des ministres.

Le président de l'Assemblée nationale ou du Sénat peut, en application de l'article 39 de la Constitution, solliciter l'avis du Conseil d'État sur les propositions de lois d'origine parlementaire.

La consultation du Conseil économique social et environnemental (CESE) est obligatoire pour avis sur les projets de loi de plan et les projets de loi de programmation à caractère économique, social ou environnemental

Le Conseil des ministres se réunit chaque mercredi matin et adopte le dépôt des projets de loi du Gouvernement, présente certains actes règlementaires (ordonnances et décrets en Conseil des ministres) et produit un compte-rendu.

L’examen des lois

Le projet de loi du Gouvernement est déposé indifféremment à l’Assemblée nationale (AN) ou au Sénat.

Seuls les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale doivent être déposés prioritairement à l’AN. Les projets de loi concernant l’organisation des collectivités territoriales sont d’abord déposés au Sénat.

L’examen en commission

L’examen des propositions de loi débute dans l’assemblée du parlementaire qui en est l’auteur.

La commission compétente dans la matière juridique concernée par la loi l’examine.

L’AN comprend 8 commissions permanentes, nombre maximal fixé par la Constitution :

  • ·         Affaires culturelles et éducation

  • ·         Affaires économiques

  • ·         Affaires étrangères

  • ·         Affaires sociales

  • ·         Défense nationale et forces armées

  • ·         Développement durable et aménagement du territoire

  • ·         Finances

  • ·         Lois

La constitution d’une commission spéciale pour l’examen d’un projet ou d’une proposition de loi peut être demandée par le Gouvernement (elle est alors de droit), par le président d’une commission permanente, par un président de groupe ou par quinze députés au moins.

Le Sénat est composé de 7 commissions permanentes :

  • ·         La commission des affaires économiques

  • ·         La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

  • ·         La commission des affaires sociales

  • ·         La commission de la culture, de l’éducation et de la communication

  • ·         La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable

  • ·         La commission des finances

  • ·         La commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale

  • ·         Leurs missions d’information

La Commission désigne un de ses membres pour être le rapporteur. Ce dernier présente le rapport à l’ensemble de la Commission. A l’issue d’un débat, les parlementaires de la commission peuvent soit adopter le texte tel quel, adopter un texte amendé ou rejeter le texte initial.

La loi doit être votée dans les mêmes termes par l’Assemblée nationale et le Sénat.

L’examen en séance publique

Le texte adopté en commission est inscrit à l’ordre du jour de la première assemblée où il a été déposé.

Il est ensuite discuté en séance publique et peut être à nouveau modifié par des amendements. Les parlementaires votent d’abord pour chaque article et amendement, puis, pour l’ensemble du texte.

Les membres du Parlement et le Gouvernement ont le droit d’amendement, en commission ou en séance publique. Tout député peut déposer un amendement, qu’il soit membre ou non de celle-ci.

Le texte est transmis à l’autre assemblée. La même procédure s’opère : examen et vote en commission et en séance publique. Si la deuxième assemblée vote le texte sans modifications, le texte est définitivement adopté. Si des amendements sont introduits, le texte repart à la première assemblée (navette).

Les séances des deux assemblées sont publiques, le compte rendu intégral des débats est publié au Journal officiel.

Si après deux lectures par chacune des assemblées, aucun accord n’a été trouvé, le Gouvernement peut convoquer une commission mixte paritaire (CMP), composée de 7 députés et de 7 sénateurs. A ce stade, sauf accord du Gouvernement, aucun amendement n’est accepté. La CMP doit aboutir à un texte commun adopté par chaque assemblée dans les mêmes termes. En cas d’échec, une nouvelle lecture du texte a lieu dans les deux assemblées. Le Gouvernement peut alors donner le dernier mot à l’AN.

La promulgation

Après l’adoption, la loi est promulguée par le Président de la République (PR) dans les 15 jours qui suivent la transmission du texte adopté au Gouvernement. Durant ce délai, le PR, Premier ministre (PM) le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat, 60 députés ou 60 sénateurs, peuvent demander au Conseil constitutionnel d’examiner la conformité du texte à la Constitution. Le Président peut également demander un nouvel examen du texte ou de certains de ses articles.

Publication au journal officiel

La loi entre vigueur à la date qu’elle fixe ou à défaut le lendemain de sa publication au journal officiel.

La mise en œuvre

Elle est permise par la publication au Journal officiel des décrets d’application.

L’interprétation, les commentaires, l’évaluation, la modification et l’abrogation

·         Une loi peut être interprétée par le juge lors d’un contentieux, qui rendra une jurisprudence.

·         Elle peut faire l’objet de commentaires doctrinaux de la part des universitaires et des professionnels du droit.

·         Elle est peut être évalué par des instances, commissions, conseils…

·         Enfin, elle peut être modifiée ou abrogée par un texte supérieur ou équivalent.



[1] [1] Hassenteufel, Patrick. 2010. « Les processus de mise sur agenda : sélection et construction des problèmes publics ». Informations sociales, no 157 (février): 50‑58.

 

[2] Quelles sont les étapes du vote d’une loi ?. In Vie-publique.fr. Vie-publique.fr [en ligne]. Direction de l’information légale et administrative, 2 octobre 2012 [consulté le 18 janvier 2017]. Disponible sur : http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/fonctionnement/parlement/loi/quelles-sont-etapes-du-vote-loi.html

Jean-Pierre BONHOURE. Connaissance de l’Assemblée n°5 Les principales étapes de la procédure législative. In Assemblée nationale.fr. Assemblée nationale.fr [en ligne]. Secrétariat Général de l'Assemblée nationale, Octobre 2000 [consulté le 20 janvier 2017]. Disponible sur : http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/collection/5.asp#P0_0

http://www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-assemblee/role-et-pouvoirs-de-l-assemblee-nationale/les-fonctions-de-l-assemblee-nationale/les-fonctions-legislatives/la-procedure-legislative

[3] LOI organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution


Modifié le: mardi 23 mars 2021, 14:01