UP1-PROG-10-L3K301-119 - Licence 3ème année Philosophie parcours Humanités;UP1-PROG-10-L3K302-119 - Licence 3e année Philosophie parc. logique et culture scien.

Contagion : éléments pour l’histoire critique d’un concept.

 

Pendant des siècles précédant la découverte tardive des « germes », micro-organismes à l’origine des maladies infectieuses, on a forgé différentes représentations de la transmission directe ou indirecte de certaines maladies ainsi que des facteurs, vecteurs ou milieux favorisant l’infection. Avant même que l’invisible ne soit rendu visible grâce aux microscopes, sous ses différentes espèces (parasites, bacilles ou encore virus), avant que les variétés de ses modes d’action ne soient clairement identifiées, on s’est efforcé de se le représenter (sous différentes formes : animalcules, contagium vivum, semences, miasmes, poisons, etc.) et on a utilisé ces représentations imaginaires afin de lutter contre les maladies. Ces conceptions pré-savantes de la contagion ont notamment influé sur la police médicale ou sanitaire à l’œuvre au moment des épidémies, lorsque les autorités locales ou étatiques plus ou moins compétentes s’emparaient du problème : lazaret, confinement, fumigations, passeports sanitaires, etc. sont autant de réponses pratiques à ce pur jeu d’hypothèses sans confirmation. L’histoire de la médecine s’est parfois épuisée dans la recherche des précurseurs de la virologie sans mesurer clairement la distance qui séparait une médecine devenue science de pratiques de conjuration reposant sur une lutte « à l’aveugle » avec l’invisible.

Le développement de l’épidémiologie au milieu du 19e siècle, puis de la bactériologie et de la virologie à la fin du 19e siècle et au début du 20e, avec à son foyer la découverte des micro-organismes, a naturellement bouleversé nos représentations de la contagion ainsi que de la contagiosité des maladies infectieuses – sans pour autant que les instruments de lutte contre les épidémies aient radicalement changé. C’est cette histoire qui mêle bouleversement théorique et permanence des pratiques voire rémanence des cultures de la contagion que l’on voudrait retracer ici, au moment où l’épidémie présente superpose dans les pratiques et dans la théorie différentes strates de cette même histoire.

 

Eléments de bibliographie :

 

P. Baldwin, Contagion and the State in Europe (1850-1930),  Cambridge University Press, 1999.

K. Codell Carter, The Emergence of Causal Concepts of Disease. Case Histories, Routledge, 2003.

M. DeLacy, The Germ of an Idea: Contagionism, Religion and Society in Britain, 1660-1730, Palgrave, 2016; Contagionism Catches On: Medical Ideology in Britain, 1730-1800, Palgrave, 2017.

F. Delaporte, Histoire de la fièvre jaune, Payot, 1989 ; Le savoir de la maladie, PUF, 1990.

G. Favre, Epidémies et contagions, PUF, 1998.

M. Gmerk, « Les vicissitudes des notions d’infections, de contagion et de germe dans la médecine antique », in : G. Sabbah (ed.), Textes médicaux latins antiques, Presses de l’Université de Saint-Etienne, 1984, p. 53-70

M. Harrisson, Contagion. How Commerce Has Spread Disease, Yale University Press, 2012.

V. Nutton, “The seed of disease: An explanation of contagion and infection from the Greeks to the Renaissance”, Medical History, 1983, 27, p. 1-34; “The Reception of Fracastoro’s Theory of Contagion: The Seed That Fell among Thorns”, Osicir, Series 6, 1990, p. 196-234; “Did the Greeks have a Word for it? Contagion and Contagion Theory in Classical Antiquity”, in: L. I. Conrad, D. Wujastyk (ed.), Contagion, Perspectives form Pre-Modern Societies, Routledge, 2000, p. 136-162.

Ch. Rosenberg, Explaining Epidemics, Cambridge University Press, 1992.

M. Santer, Confronting Contagion. Our evolving understanding of disease, Oxford University Press, 2014.

M. Worboys, Spreading Germs. Disease Theories and Medical Practice in Britain, 1865-1900, Cambridge University Press, 2000.

 

Première partie sur la rupture scientifique initiée par la théorie contemporaine de la contagion : Codell Carter sur la naissance d’un modèle causal de maladie. Idée : toute l’histoire de la médecine qui précède est une pure spéculation, relève de la métaphysique, de la théologie. Avant découverte des agents infectieux, pas à proprement parler de rapport réel avec l’invisible : mais des phénomènes de conjuration.

Limite de ce point de vue : physicalisme étroit, idée d’une médecine qui serait de laboratoire, d’une médecine qui avant d’être médecine moléculaire ne serait rien. Pourtant médecine est une science sociale au moins autant qu’une science médicale et elle a développé des connaissances précises des régimes de contagion avant la théorie des germes.

Partir peut-être d’un des modèles les plus séduisant, proposé par Rosenberg dans « Explaining Epidemics » : modèle configuration-contagion-prédisposition. Montre que des modèles s’affrontent, entre modèle contagioniste et anticontagioniste, avec toujours un mystère, qui est le fait que si contagion il y a elle n’est pas toujours universelle : comment expliquer les cas à part ? Question : et si la société n’avait pas plus fait de progrès avec l’approche écologique (configuration) qu’avec l’approche épidémiologique (contagion). En fait, l’approche écologique correspond à l’amélioration des canaux des échanges et elle peut être liée à l’idéologie propriétaire. C’est aussi une victoire de l’idéal de la propriété, mais pas seulement. Là aussi il faudrait reprendre le dossier sanitaire (arrivée d’eau) tel qu’il est examiné par Werber Troesken et reprendre aussi la question de l’amélioration des conditions de vie en occident en la découplant de la lutte contre l’épidémie pour montrer que c’est la lutte contre d’autres maladies infectieuses qui a permis à la fois de voir éclore le capitalisme ou de l’encourager (en tous les cas d’encourager l’idéologie propriétaire) et d’accroître le niveau de vie moyen.

Distinctino entre approche holiste et causale de la maladie, qui se confronte aussi  l’approche constitutionnelle (et éventuellement humorale). Ces ajustements : relation de fonction dans la médecine, sont liés à des attendus aussi bien naturels que sociologiques. Ce qui traduit une histoire complexe du rapport à l’épidémie.


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Consultation des ressources uniquement : aucune cohorte inscrite.

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