Le désir

Le désir se présente comme le moteur primordial de notre action dans le monde : sans l’impulsion qu’il nous octroie, nous serions contraints à l’inertie. De ce point de vue, il paraît devoir être d’abord conçu comme le fondement de la volonté délibérée et réfléchie qui nous caractérise en tant qu’êtres humains : la raison pratique se résumerait ainsi à ordonner, sélectionner, organiser nos désirs afin de nous permettre d’atteindre à une satisfaction sans cesse croissante et, finalement, au bonheur. Cet optimisme se heurte cependant à la nature tout à la fois opaque et indomptable du désir : non seulement nous ne connaissons pas toujours les motifs qui nous animent, mais en outre tout désir paraît envelopper une certaine irrésistibilité qui empêche la réflexion pratique plutôt qu’elle ne la fonde. Dans ces conditions, l’idée d’une action rationnelle ne vire-t-elle pas à l’oxymore ? Faut-il donc accepter, pour continuer de se mouvoir et d’agir, d’être le jouet de désirs par essence irrationnels ? Inversement, si nous voulons absolument être fidèles à la raison, devons-nous éteindre la totalité de nos désirs ? Le but de ce cours sera ainsi d’approcher ces problématiques en mettant au jour les rapports intimes entre le phénomène du désir et les thèmes de la conscience, du corps, et de l’éthique. Après avoir souligné l’aspect tragique du désir comme passivité, manque, et souffrance, nous insisterons sur le caractère indispensable de sa puissance motivante pour notre engagement pratique avec les choses et les autres – la raison seule étant incapable de nous mouvoir. Enfin, dans un dernier temps, nous révélerons l’apport positif des désirs vis-à-vis de la connaissance du bien : loin d’être une pure impulsion aveugle, notre vie désirante nous dévoile ce qui compte pour nous et participe ainsi à constituer un monde riche en valeurs.